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C'est ma vie !

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……………………………………………….................68ème épisode

 

C’est avec un vif soulagement que Christiane avait recouvré son appartement et son quotidien. Elle s’était délestée de la promiscuité journalière que lui avait imposée son mari, tout le long de ce semblant de vacances, qui lui avaient fait l’effet d’un séjour en enfer. Désormais, il lui fallait tourner la page, sans pour autant oublier les affronts et les humiliations. Rien ni personne ne pourrait amenuiser les stigmates profonds infligés à son âme. Biot, le village, la maison de M. Lelievre, resteront indélébiles ; comme une scarification qui se refuse à cicatriser. Les mots, les expressions, les regards de haine de son mari qui l’avait publiquement injuriée, répudiée, résonneront à jamais dans son esprit, comme les cloches du tocsin, la veille d’une guerre mondiale.

 

Sa fille avaiy rejoint ses copines et sa maîtresse et, sa mère, avait sans amertume, réintégré le bureau d’expertise comptable où elle travaillait. Elle avait également revu Lola qui, la pauvre, n’avait pas pris de vacances. Mon Essentiel avait failli lui dire « Des vacances comme les miennes, j’en souhaite à personne ! ». Mais elle n’aurait pas compris ! Souvent, Lola, d’un ton non dénué d’envie, lui disait « Quelle chance, tu as, d’avoir un mari…!! ». Christiane, lui répliquait toujours la même chose. « Un mari comme le mien ?? Pas sûr ! » Si cette dernière, avait su extirper les milles facettes de S.-A…, elle aurait remercié son destin de l’avoir laissé célibataire, libre de ses actes et de ses mouvements !

 

Pourtant, elle se souvenait encore du jour où elles étaient accoudées au bar d’une brasserie ; chacune, une coupe de Champagne à la main. C’est un vieux copain qui les avait interpellées en insistant pour qu'ils boivent un verre ensemble. Trois tournées s’étaient enchaînées. Les deux femmes, volubiles, n'avaient pas vu plus le temps passer et, l’effet du Champagne aidant, elles étaient repartis à discuter, à plaisanter et à rigoler, jusqu’à ce que Christiane, pose son regard sur la pendule et recommande à Lola, de finir son verre. De retour à la maison, S.-A…. s’était abstenu de toute réprimande. Or, elles ne gagnèrent pas aux changes, car il ne décrocha pas un mot de toute la soirée.

 

Depuis leur retour de vacances, il ne parlait plus de divorce et avait cessé d’insulter sa femme, à tout propos. Toutefois, sa politique était resté identique : silences prolongés et sournoiseries, qui faisaient partie intégrante de son personnage. Finalement, Christiane, avait compris son manège. Trop possessif, il préférait garder sa femme, quitte à la rendre malheureuse, plutôt que la laisser entre les mains du premier venu. En l’occurrence, Kamel ! A cause de cette jalousie, il se refusait de divorcer, en dépit de l’influence malsaine de sa famille. L’idée qu’un autre homme, puisse posséder Christiane, lui était intolérable !

 

Bientôt, une bouffé d’air frais vint rafraîchir les dures journées, de ma Préférence à moi. Des journées coordonnées par l’ordinateur, par des aller/retour aux bureaux de ses collègues et par le retour pur et simple, à l’ordinateur. La société venait d’embaucher une nouvelle standardiste qui se nommait S. Joly. Elle était grande, pulpeuse et portait de très hauts talons avec des jupes hyper courtes. Ce qui lui donnait un genre un tantinet vulgaire. La profondeur de ses yeux bleus, était soulignée par des cernes très sombres, qui lui mangeaient le visage. D’où, cette mine aux traits ravagés, qui donnait le sentiment, qu’elle était éternellement épuisée. Non. Mademoiselle Joly n’était pas très jolie. Je suis donc dans le droit de me demander pourquoi, Mon Essentiel, fut à ce point attirée par cette fille, qui n’était pas attirante. Lorsqu’elle se déplaçait avec ses talons trop haut et ses jupes à ras le bonbon, on l’aurait plus imaginée rue Saint-Denis, que standardiste avenue Victor Hugo. Néanmoins, elle avait une sorte de charisme qui attirait Christiane, comme si celle-ci avait été envoutée. Sylvie ne parlait pas beaucoup. Par contre, elle jetait des regards furtifs en direction de sa collègue, qui se trouvait dans sa trajectoire. Parfois, Christiane se sentant observée, tournait la tête dans sa direction et lui adressait des sourires chaleureux et équivoques. Comme une invitation à mieux la connaître. C’est Christiane, intriguée par sa personnalité, qui fit les premiers pas.

 

Au fil des semaines et des mois, une complicité s’installa entre les deux femmes. Christiane, toujours excessive et en demande d’amitié, lui écrivit une poésie dont les mots fluides, s’étalèrent sur le papier, comme s’ils étaient sortis d’eux-mêmes. Ma Préférence à moi, lui confia ses secrets les plus intimes, alors que Mlle Jolie, restait sur ses gardes. D’instinct, Christiane, percevait toute la réticence qu’elle avait à la fréquenter ; peut-être, pour éviter de se dévoiler...? Au bout d’un an de bons et loyaux services, la Direction, décida de la licencier. De son côté, Christiane, vécut cet évènement, comme une tragédie ; une trahison personnelle. Une déchirure intérieure qui, greffée à ses difficultés familiales, la fit sombrer dans une nostalgie sans nom. Cette Sylvie, sur qui elle ne savait pas grand-chose, lui manquait cruellement. Rendant ses employeurs responsables de ce qu’elle considérait comme une « injustice », elle se renferma sur elle-même et devint taciturne. Monsieur Baryton, qui avait lui-même recruté S. Joly, estimait beaucoup Christiane. Aussi, frappé par son infinie tristesse, il lui fit cette remarque. « Christiane… Elle ne vaut pas le coup ! C’est une pute ! » Cependant, elle ne voulut rien savoir. Persuadée que Monsieur Baryton, secrétaire général, était comme tous les hommes, elle en déduisit que ce dernier avait fait des avances à S…, qu’elle avait évidemment refusées. D’où, ce licenciement…

 

Tant bien que mal et en dépit des conflits que cela générait au sein de sa famille, Christiane, continuait ses spectacles de danse orientale. Non pas, pour le plaisir de contrarier son mari, mais pour les joies que lui apportait la danse, par elle-même. L’évasion, le dépassement de soi, le mystère des sons de la musique égyptienne, la magie des costumes et la sensation d’être reconnue et valoriser. Tout cela n’avait pas de prix !

 

Les fêtes de fin d’années approchaient. Jeanne, comme l’année précédente, avait pris le taxi jusqu’à Paris, pour serrer sa fille et sa petite fille, dans ses bras. Mi figue, mi raisin, S.A…. l’accueillit froidement, en baragouinant un vague « bonjour ». Son manque de savoir-vivre, sa muflerie...?   Elle le lui rendait bien ! Le réveillon de Noël eut lieu à Ecouen, chez les parents de son mari qui pourtant, avait crié haut et fort quatre mois auparavant, son désir impérieux de divorcer. Un tel volte-face était d’un ridicule ! Ce fut un remake du Noël précédent. Sylvie, la petite sœur chérie à son papa, persistait à ignorer Christiane, en la toisant des pieds à la tête, comme si elle venait de sortir d'une pochette-surprise. Avec sa toilette trop clinquante, ses talons trop haut et sa coiffure qui la vieillissait, elle devait se considérer comme supérieure et indigne de côtoyer sa belle-sœur, qu’elle jalousait ; ça crevait les yeux ! Par contre, Madame gérait, commandait et son monde, se devait de marcher droit. Et bien oui, elle était la petite dernière, la seule fille d'une fratrie de trois enfants ; des garçons… Son mari, Richard le franchouillard, était le maître incontesté de la maisonnée. Un homme vulgaire, à l’esprit dans la culotte, qui ne cessait de raconter des blagues salasses… Sous l’immense sapin, d’innombrables paquets étaient étalés sur le sol, dans l’attente d’être ouverts. F… reçut un service à café miniature en faïence qui, au moment de partir, avait disparu de la circulation. Comme un mirage... On ne sut jamais qui l’avait embarqué. La pestiférée qu’on supportait par obligation, hérita d’une boîte de chocolat de supermarché, alors qu’étant hépatique de naissance, elle ne devait en aucun cas, en manger !

 

Le soir du nouvel an, Christiane offrit à son mari, un attaché-case en cuir marron clair, qu’elle avait d’ailleurs payé une petite fortune. Aussitôt qu'il l'eût aperçu, il partit à vociférer des horreurs tout en la fusillant du regard et, en lui gueulant aux oreilles, un « J’ai horreur des cadeaux ! ». Ceci dit, il prit l’attaché-case et le balança en direction de son épouse. Jeanne, sa mère, se garda bien de prendre parti, mais, en resta toute chavirée. Ce soit là, ils étaient invités chez son oncle et son épouse, Anne, qui était une vraie femme du monde. Afin de ne pas gâcher la soirée, Christiane, fit le maximum pour tenter de masquer sa déception. Tous les ans, on se souhaite une meilleure année et une bonne santé et, le premier janvier de l’année suivante, rien n’a bougé et tout est rigoureusement resté à la même place. Pour que cela change, il aurait fallu un miracle. Or, Christiane, ne croyait plus au miracle. Quelque chose lui confirmait qu’elle avait raison. « Tel on fait son nid on se couche ! ». Elle avait la ferme intention d’assumer sa vie jusqu’au bout. Et ce, tout en se sachant damnée par son destin et déchue, par l’idée même, du bonheur. Seul comptait sa fille, son moteur, sa force, pour ne pas céder à l’appel parfois impérieux, de mourir.

 

Les rapports entre Christiane et son mari, étaient devenus invivables. Christiane vivait des week-ends épouvantables. Des disputes éprouvantes qui se répercutaient sur son humeur au travail et qui se concrétisaient des crises de larmes qu'elle ne pouvait contenir. Vous le devinerez ; la danse était une des coupables. Par ailleurs, mon Essentiel, venait de faire la connaissance d’une jeune danseuse marocaine qui l’avait jointe au téléphone, de la part de son ancien professeur de danse, Fatima. La jeune marocaine lui avait proposer de danser ensemble en duo, de temps à autres. Christiane avait été partante. Par contre, il y avait une entrave de taille : elle demeurait à Combs-la-Ville, dans la Marne !! Pour son premier gala, Christiane, n’avait pas eu le choix des transports. Les mains encombrées de deux sacs remplis de costumes et de leurs accessoires, elle prit son courage à deux mains  et s'engouffra dans le métro pour attraper son train de banlieue. La marocaine, l’attendait patiemment à la gare, confortablement installée dans sa voiture. Lorsqu’elle découvrit Christiane, les premiers mots qu’elle prononça en la détaillant, c'est « Je ne t’imaginais pas du tout comme ça ». Après une telle réflexion, on est en droit de tout imaginer… « Ah bon ?» lui avait répondu cette dernière, désarçonnée par son accueil. D’une nature complexée, mon Essentiel, traduisit le message négativement. Au sujet de cette fille, qui s'appelait Sophia, ce fut sa première remarque désobligeante car, il s’en suivit bien d’autres. Des reproches, des commentaires assassins, à l’encontre de sa partenaire. Ce qui mettait à jour son tempérament jaloux et envieux, très spécifique aux danseuses d’origine maghrébine.

 

Il leur arrivait de danser séparément. Toutes les fois où Sophia s’estimait dépréciée aux yeux du public, elle traduisait son mécontentement, en lançant des vannes à sa camarade. Une irritation, qu’elle essayait malgré tout, de cacher… Christiane, enivrée par les applaudissements et les compliments, par rapport à sa plastique ou à son art, emmagasinait tout en bloc et sans faire de vague. Lors d’une soirée dans un restaurant de Melun, où elles avaient l’habitude de danser les week-ends, leur prestation terminée, le patron leur tendit à chacune une enveloppe, qui était sensée contenir le cachet convenu entre les deux parties.

 

Une fois à l’extérieur, la jeune marocaine, stupéfaite, s’aperçut qui lui manquait trois cents francs, alors que sa partenaire avait la totalité de son cachet. Une perte qu’elle ne put récupérer. Au regard de la distance, comme toutes les autres fois, Christiane dormit chez sa rivale, qui ne se priva pas de lui faire des allusions insidieuses au sujet de ce manque à gagner. Comme si elle avait été de mèche avec le restaurateur... Ce qui était insensé ! Des exemples comme celui-ci, je pourrais vous en relater des dizaines. De la vanne cinglante, aux insinuations virulentes qu’elle lui adressait en douce, bien enveloppée dans du papier de soie. Lors d’une coupure entre deux spectacles, elles étaient debouts devant la glace des toilettes, affairées à retoucher coiffure et maquillage, quand Christiane, émerveillée par l’abondance de la chevelure de sa camarade, lui exprima son admiration. L'intéressée, visiblement excédée, braqua son interlocutrice, un regard mauvais et répliqua sèchement : «On ne peut pas tout avoir !" Une réponse au travers de laquelle, Christiane, perçut toute la frustration de sa partenaire. Une pierre dans son jardin qu'elle lui avait lancé sans raison...

 

Un jour, qu’elles discutaient toutes les deux au téléphone, Sophia, affirma à Christiane, qu’elle ressemblait à la Reine-mère d’Angleterre (ce qui au vu de son âge, n’était pas très flatteur). Une autre fois, elle lui balança « Tu n’es pas très belle… T’es petite, etc. Quand Christiane était chez elle, la fille l’obligeait à retirer ses chaussures, sous prétexte que ses talons pouvaient abîmer son tapis (c’était des dalles en synthétique). Mon Essentiel, au nom de son éducation, s’exécutait sans discuter. Une humiliation gratuite qui révélait la jalousie qui rongeait le cœur de cette fille, à problèmes. Curieusement, le public devant lequel elles se produisaient, les serveurs, les clients, etc. leur donnaient le même âge et souvent, on leur demandait si elles n’étaient pas « sœurs ». Sur ce plan, d'autant plus jalouse, Sophia, n’omettait pas de remettre les pendules à l’heure, en proclamant « Au moins toi, Shanaze, tu n’es pas comme untelle (collègues danseuses) qui se prétend toujours jeune ! » ; et j’en passe.

 

Que pouvait-elle répondre ? Lui dire ses vérités et se fâcher ? Christiane, s’estimant plus intelligente, s’efforçait de ne rien dire. Néanmoins, en son for intérieur, cette mentalité qui ne lui ressemblait pas la révoltait et, souvent, elle était à deux doigts de craquer et de lui cracher ses vérités en pleine figure !

 

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