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La sorcellerie, aujourd'hui (2)

    001uu

 

Le « pouvoir sorcier » est composé de deux éléments : la connaissance de rituels supposés déclencheurs d’effets immuables et la capacité de les mettre en œuvre comme il se doit, parce que l’individu a « le sang fort » : une sorte d’aptitude propre à sa personne, que nous pouvons nommer le « don », faute de mieux.

 

Hormis le fait d’être prédestiné à être un « Homme du Don » en raison du moment de sa venue au monde – c’est par exemple le cas de Monsieur Conté et de Madame Arlène, respectivement natifs de la nuit de la Toussaint (jour des morts) et de la Saint-Jean (jour des sorciers) -, ce sont généralement des signes spécifiques qui révèlent cette faculté. Monsieur Ménard s’aperçut ainsi très jeune, qu’il pouvait influencer le comportement des gens qui l’entouraient, en les soumettant à une « suggestion télépathique ». Il en est de même pour Monsieur Dréan qui, par ailleurs, « charmait » les batraciens et les reptiles, s’établissant ainsi une solide réputation de sorcier parmi les camarades d’école.

 

Bien souvent, ce sont des chocs émotionnels, comme la perte brutale d’êtres chers, qui déclenchent chez certaines personnes la capacité à anticiper des situations pouvant être fâcheuses ou à soulager les souffrances d’autrui par imposition des mains, tout comme les magnétiseurs, ce qu’ils sont aussi très souvent. Les sorciers peuvent donc se soustraire au cours néfastes des choses, voire le modifier.

 

Cet itinéraire jalonné par la répétition d’évènements qui conduisent les intéressés à prendre conscience de leurs dispositions, peut aussi les amener fortuitement à être en contact avec des « entités supranaturelles ». Ainsi, Mesdames Le Men et Languevelec, déclarent communiquer avec des « amis de l’invisible ». Mais, dans les cas, ces troubles de la sensibilité – qui traduisent la potentialité du don -, doivent être authentifiés puis validés socialement par quelqu’un autorisé à diagnostiquer le « sang fort » : un voyant, un guérisseur, un sorcier. A charge ensuite pour le futur sorcier de cultiver et développer ses capacités, puis de les mettre en œuvre, établissant ainsi la justesse de ce diagnostic.

 

Si les « pouvoirs » en ce domaine sont parfois innés, ils sont plus généralement acquis auprès d’un sorcier désireux de se trouver un successeur, l’âge venant. C’est prioritairement dans la famille qu’il sera recherché car, un tel don, est un considéré comme un trésor, comme quelque chose dont le contenu ne doit surtout pas être dévoilé au tout venant. Ces raisons purement pragmatiques créent de véritables lignées de sorciers, venant conforter, pour le profane qui n’est pas au fait des modalités de transmission du don, l’idée reçue qui veut qu’il soit d’origine héréditaire, un stéréotype qui nous vient de la terrible époque de « la chasse aux sorcières » où des familles entières furent brûlées sur le seul motif que la « rumeur commune » attribuait à un aïeul ce genre de compétence. Mais, comme les sorcières ne jouissent pas d’une bonne réputation, hormis dans le cercle de ceux qui ont pu tester à leurs profits leurs facultés, il est fréquent que le don sorte du cercle familial et qu’un étranger soit initié.

 

Le pacte Diabolique et le commerce avec « les forces de l’Au-Delà »

Pendant des siècles, il fut convenu de considérer que les sorciers étaient à l’origine des maux affligeant les humains parce qu’ils avaient pactisé avec celui qui incarne la source même du mal : le diable. La conviction en l’existence d’un contrat passé entre Satan et certains individus, à l’issue duquel ceux-ci seraient pourvus de « pouvoirs magiques », fut le fondement de la répression sorcière des XVème et XVIIème siècles. Qu’en est-il aujourd’hui de cette croyance en l’origine diabolique des « pouvoirs sorciers » ?

 

De nombreux spécialistes de l’occulte, comme Messieurs Jamelin et Conté, ou Mesdames Languevelec et Arlène, commercent avec d’invisibles « entités » pour avoir leur avis sur des points épineux concernant les affaires qu’ils ont à résoudre, voire pour y participer directement en mettant « leurs pouvoirs » à leur disposition. C’est ainsi que les défunts (amis de l’invisible), des anges issus de la Kabbale, des saints ou le Christ, président au bon déroulement de nombreuses opérations, tout comme le diable et certains de ses lieutenants.

 

Dans tout cela, il n’est point question de pacte, mais seulement de l’idée que des « forces de l’au-delà » peuvent être maniées par les sorciers dans certaines conditions. A la finale, les cohortes infernales ou angéliques sont devenues les esclaves des magiciens qui connaissent les moyens de les invoquer. Une procédure qui ne va pas sans risque car, comme le précise Madame Arlène, « Quand on commande à ce genre de forces, surtout si elles sont du côté obscur (autrefois on aurait dit du côté du diable), il faut toujours penser à s’en protéger car elles essaient parfois de prendre le dessus. A nous de les dominer, d’être plus malins et d’en tirer le maximum ». Pour cela, il est impératif que les sorciers cultivent surs facultés, qu’ils enrichissent le savoir acquis durant leur initiation, ce qui se fait généralement par la lecture d’ouvrages spécialisés : les grimoires.

 

Cultiver le don : Les grimoires de sorcellerie

De tout temps, le livre fut considéré comme l’une des sources du savoir. L’occulte n’échappe pas à cette règle. C’est pourquoi ces praticiens sont avides des connaissances qu’ils peuvent y puiser, estimant que les rituels qu’ils contiennent sont éminemment efficaces. Deux types d’ouvrages se présentent aux sorciers : les publications renfermant surtout des prières (comme cette de l’abbé Julio), prête thaumaturge du XIXème siècle qui fonda une Eglise dissidente de celle catholique romaine qui désavouait ses pratiques. Ces opuscules contiennent quantité de recettes, pas toujours ragoutantes, concernant l’usage des plantes, des pierres, des animaux et maints procédés visant à satisfaire les plus folles aspirations comme « faire danser une fille nue », « gagner au jeu », « se rendre invisible », « nouer l’aiguillette d’un rival »… On y trouve aussi de nombreux moyens de se garantir de malchance, des explications relatives à la fabrication d’amulettes ou de talismans censés vous aider dans vos œuvres et, si cela ne vous suffit pas, des formules destinées à vous rendre maître des « puissances supérieures », lesquelles sont souvent « d’infernales créatures ».

 

Malgré la complexité des procédés mentionnés dans ces textes (où se procurer une verge de loup pour rendre un homme impuissant ?), le savoir proposé au lecteur est marqué du sceau de la réprobation, les désenvoûteurs tempêtant souvent contre leur divulgation commerciale. En fait, ces « mauvais livres » sont considérés à l’image du pouvoir qu’ils représentent et sont censés contenir : ils sont dangereux. Ainsi, abordent les récits de lecteurs « pris » par les forces qu’ils ont malencontreusement déclenchées. De même, selon certains, leur simple possession est susceptible de provoquer de fâcheux effets, par exemple des phénomènes de hantise, des déplacements d’objets ou de meubles dans des pièces, voire d’affecter la sante des êtres humains.

 

D'après le texte de Dominique Camus008-copie-1

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